#028 Catch et Musique : même combat !

Attention, nos chroniques ont des crocs n°028!

   Cela vous parait étrange ?... je peux le comprendre, mais attendez de lire la suite avant de dire "ouais, trop nul, le catch c'est que du bidon de toute façon !". Et pour commencer, replaçons deux ou trois paramètres essentiels à la bonne compréhension de cette chronique :

1/ Je ne suis pas un grand fan de catch, ni même à proprement parlé un petit... j'y trouve simplement des reflets intéressants.

2/ Le catch dont je parle pour l'avoir étudié pendant un peu plus de deux ans est celui des superstars de la WWE, le plus gros show américain tant en audience télévisée qu'en fréquentation de salles et autres stades et sites démesurés crées à ciel ouvert.

3/ Ce catch ne s'est jamais targué de n'être autre chose que du pipo, dans le sens où il est scénarisé. Eux-mêmes se réclament ouvertement du divertissement et du spectacle, et non d'un quelconque sport par exemple.

   Je ne peux m'empêcher d'ailleurs au sujet de cette critique aussi courante que facile que non-réfléchie qu'absurde que désuète que ouvrez-les-yeux que qu'est-ce-qu'il-vous-faut que rendez-vous-compte-de-la-bêtise-que-vous-dites "c'est même pas du vrai", de préciser que vous devriez bien entendu émettre cette même critique lorsque vous regardez un film, lisez un roman, engloutissez des pubs, vous délectez d'une pièce de théâtre ou mangez des plats préparés William Saurien... Alors pourquoi n'émettre cette basse remarque qu'à propos du catch et pas du reste ?... peut-être parce que dans ce cas précis, on aimerait bien que ça soit du vrai, que ça castagne sec, que ça rage à souhait. On expulserait tous nos interdits au travers de cette violence. Et qu'au fond, les plats préparés, on s'en fiche pas mal de savoir si c'est pas du vrai, la preuve tout le monde en achète... (enfin moi pas trop quand même !...). Dans tous les cas et dans le catch, ce qui n'est pas faux, ce sont les véritables prouesses techniques qu'accomplissent les types (certains préfèreront regarder du patinage artistique pour cela...), mais surtout, le formidable exutoire et les réels messages passés par les situations et les personnages de ce show.  S'il y a du vrai, c'est aussi donc dans les sentiments que vivent les spectateurs lors de ces shows. Lorsque par exemple un catcheur balance à 80.000 spectateurs que c'est de leur faute s'il y a tant d'immigrés sur le sol US, et qu'ils n'avaient qu'à réfléchir avant de voter. Ou quant un autre crée une équipe d' "Américains purs" car il en a assez de voir des noirs partout... et qu'il annonce ça à Washington devant 100.000 spectateurs ! Certes il y a de la provocation, mais on est bien loin de pouvoir prétendre chez nous "provoquer" sur des sujets qui fâchent, alors que dans le catch, ben ils hésitent pas. Bref, mais que tout ça parait diamétralement opposé à notre bon vieux thème non moins fictif puisque crée : Music baby !

   Eh bien le voilà le lien, je l'expose dans une seconde (voire dans quelques mots...) : lorsque deux personnes entrent ensemble sur scène, qu'elles se donnent à fond dans ce qu'elles savent faire de mieux. Lorsqu'elles échangent dans le respect de la place de chacun, dans la connaissance des faiblesses et des atouts de l'autre. Lorsqu'elles font vibrer une personne, ou une foule entière l'entraînant dans sa danse. Peu importe que la fin soit écrite, ce qui compte ce sont tous les évènements, toutes les ambiances qui nous mèneront à ce final. Et justement, ce final n'est pas, mais alors pas du tout la partie importante du moment (j'ai déjà probablement pu en parler précédemment ! Petit rappel : lorsque l'on parle de création, la fin n'a aucune espèce d'importance, seul compte le périple qui nous y conduit). Alors maintenant, remontez quelques lignes et relisez ce dernier paragraphe en imaginant la chose suivante : les deux fameuses personnes peuvent être au choix un contrebassiste et un chanteur, deux catcheurs, un couple de comédien, des danseurs de tango argentin... bref nous sommes sur scène, et c'est en cela que tous font la même chose (toutes proportions gardées, n'éxagérons pas).

   J'ajoute que la danse des catcheurs est certes bâtie sur une fin écrite, mais afin d'y parvenir, ces derniers improvisent leurs gestes au fil du "combat", et ce de manière à permettre à leur adversaire d'exécuter eux aussi leurs gestes propres. Au passage, et pour l'avoir vu "en vrai", les catcheurs prêtent constamment une oreille sur les réactions du public afin de donner une forme attendue ou au contraire surprenante à leur combat. Autrement dit, c'est un jeu permanent d'adaptation afin de faire sortir le meilleur de chacun. Premièrement : si tout marchait sur ce principe, nous nous en sortirions bien mieux que ce que nous pouvons vivre, nous qui nageons dans cette merveilleuse époque que je n'hésiterai pas à nommer "LA SPIRALE DE LA MÉDIOCRITÉ" (note de l'auteur : avec les majuscules, c'est de suite plus impressionnant non ?). Deuxièmement : c'est exactement le travail du musicien dont l'aspiration est autre que de n'être qu'un simple interprète de partition, et qui apprendra donc à composer avec les autres, à tenir son rôle tout en n'étant pas brimé quant à son désir d'expression. A laisser la place, à savoir la prendre, mais toujours dans le respect des natures de chacun. J'entends par là laisser improviser le batteur parce qu'on sait qu'à ce moment-là il est dans son bain, ou prendre la parole avec sa basse pour écourter le solo d'un saxophoniste dont on sent que l'essouflement proche va faire retomber comme un soufflet au fromage raté la bonne impression générale du solo qu'il vient pourtant de cuisiner.

   En bref, voilà où tout cela nous mène (et tiens, je ne m'y attendais pas du tout à celle-là !) : l'important est de se connaître entre membre d'un même groupe (nos défauts, nos qualités, nos envies, nos humeurs, nos inspirations, nos goûts, notre marque de plats préparés préférée, etc...), afin qu'ensemble nous nous donnions les occasions d'aller vers le haut, de nous dépasser non pas pour être les meilleurs, mais juste pour être meilleur.

   Finalement, le catch et la musique : même combat ! Sonnez la cloche...

... et quand je parle de cloche, ça n'est pas de moi qu'il s'agit ! Non mais oh ?!

! DONG !