#003 Dossier presque "Ecologie" : Pollution de l'Esprit par la Culture intensive du Résultat

Attention, nos chroniques ont des crocs n°003!

   Pourquoi parler de cela (la "culture du résultat") dans ce blog à priori réservé à la Musique. Premièrement, la Musique, sa pratique, son étude, son apprentissage, les expériences qu'elle amène porte à croire qu'elle est bien souvent une belle image de ce que peut être la vie en général, et donc un reflet de ce que notre société peut donner de pire et de meilleur  (nous développerons plus tard). Deuxièmement, la culture du résultat est malheureusement intimement liée à l'apprentissage de la musique (nous développerons plus tard). Troisièmement, et dernièrement, parce que j'ai envie d'en parler (...et je ne développerai pas plus tard, ne cherchez pas !).

   J'entrerai dans le vif du sujet dès la prochaine phrase car je ne souhaite pas tourner autour du pot. FAUT-IL CHERCHER UN RÉSULTAT ? Tout autour de nous semble aller dans ce sens : systèmes de notation à l'école, mais également à l'échelle de l'économie d'un pays (je me marre 'n poors: AAA, on en sait quelque chose... les grecs aussi !), quota de ventes de forfaits, de voitures, de lave-linges, qui sera le meilleur commercial, le meilleur entrepreneur, quel objectif quantifiable, non pas qualifiable... combien peux-tu prendre de photos ces vacances, génial 5632 ! Tu télécharges des films ? Ouaip, j'en ai 765 sur mon disque dur externe... pas le temps de les voir... et la musique, qui en aura le plus sur son aïe-paude ? A tel age il faut savoir lire, à tel age on doit savoir compter, puis plus tard il faut savoir dépenser, et oublier qu'à un moment on savait compter. POURQUOI FAUT-IL SE FIXER CES RÉSULTATS ? Parce qu'on ne sait plus faire autrement que matériellement, on en perd le sens des choses. On en perd l'importance, l'essence même du chemin à parcourir. Apprendre la musique par exemple. Lorsque l'on marche sur ce chemin, on ne doit pas se dire "je ferai tel morceau dans un an, je jouerai tel solo dans cinq". Cette pensée est une déformation sociétale. Ce qui est passionnant dans la musique, c'est qu'il ne peut y avoir de but quantifiable, du moins, elle perd tout son sens lorsque l'on commence à se dire "alors poulette, je te joue quoi ? Je connais 118 morceaux sur le bout des doigts". Misère culturelle... et humaine.

   Finis les examens, contrôles et auditions de fin d'année qui occultent le fait d'apprendre autre chose que ces fameux morceaux d'examen, de contrôle ou d'audition de fin d'année qui ne sert à rien d'autre que combler les deux tiers des cours de l'année scolaire. De plus, je suis obligé de rapporter un témoignage touchant qui a été fait concernant l'ecole.john et nos pratiques barbares, mais qui résume bien ce qui transparait de "notre" vision de l'apprentissage (je fais les deux voix... hem, hem... )(attendez un instant... j'ai dis "notre" dans le sens, la vision générale d'aujourd'hui, celle que je ne partage pas)(c'est un effet de style qui me demande d'éclaircir les choses en ouvrant toute une série de parenthèses, autrement dit, inutile, voire polluant)(je m'en excuse...)(...et je reprends : deux points, ouvrez les guillemets) :

"Elle : C'est donc une école de musique ?

Moi : Oui oui, en effet...

Elle : Les élèves passent un examen en fin d'année ?

Moi : Non, pas du...

Elle : ALORS CE N'EST PAS UNE ÉCOLE !"fin de la discussion avec cette prof de collège, intéressante... non ?, cette discussion pleine d'idée, d'échange, voire de débat un peu mouvementé parfois ?...

   Je pensais naïvement que l'essence même d'une école était d'être un lieu où l'on apprenait des choses, mais il semblerait qu'il ne s'agisse en réalité que d'un espace de préparation d'examens divers. Le résultat compte plus que tout le reste. "Qu'est-ce que tu as appris cette année ? - Heuuu... - Mais tu as eu ton Bac ? - Oui oui, même pas besoin d'aller à la repêche ! - C'est génial, je suis content pour toi !" Eh bien moi je ne suis pas le plus heureux du monde de savoir ça... Bref, des exemples, il y en a malheureusement partout. J'arrête donc là de peur de dériver sur des sujets adjacents dont le développement n'aurait rien à faire dans cette chronique. Revenons un peu sur nos pas et concluons :

   Comme je le dis souvent, il faudrait 3 vies pour apprendre tout ce qu'il y a à savoir d'un seul instrument, d'un seul style de musique... En réalité... c'est beaucoup plus. Car plus on apprend, plus on ouvre des portes : il y a donc encore plus à apprendre, et encore plus de portes à ouvrir.

   PLUS ON AVANCE, PLUS LE CHEMIN S'ALLONGE. MAIS POUR ALLER OU ?...

Nulle part, partout, je ne le sais évidemment pas et je ne cherche pas à le savoir, il faut accepter cela... la seule réponse : l'important réside simplement dans le fait que l'on avance sur ce chemin.

   Alors, finis les résultats, les objectifs, les quotas, les paliers prédéfinis... il faut juste se donner une direction pour ne pas errer, puis avancer dans cette direction, toujours avancer dans cette direction, et non vers une destination. C'est durant ce voyage que des milliers de choses vont arriver, aucunes ne seront prévisibles, et toutes nous enrichirons (je ne parle bien sûr pas de dollars, bande de voyous !).